Projet artistique - Biscarosse - Ibai Hernandorena - 2013

Éclaircies

Aux abords du collège de Biscarrosse, on ne peut qu'embrasser la forêt, sorte de dentelure végétale prégnante ; recevoir la sobriété de la construction tissant des liens délicats entre architecture et nature. Le regard court, laissons-le prendre ses marques et distinguer les lignes. Partons de la verticalité qui maintient la structure du collège, de ces fûts métallique dressés comme signe distinctif récurrent de l'identité du bâtiment. Revenons sur les pas de l'architecte et partons du mât, du poteau, pour cheminer vers l'arbre.

En deçà de la façade océane, l'arbre est à la fois symbole et réalité du territoire landais et la forêt landaise est la plus vaste d'Europe Occidentale. Cette omniprésence de la canopée de résineux, de l'infini alignement des pins maritimes peut exercer sur les sens un effet quasi hypnotique faisant oublier que cet immense espace sylvestre naît et renaît indéfiniment de la main de l'homme afin d'être exploité industriellement.

Le projet Éclaircies entend jouer sur la capacité d'envoûtement naturel de la forêt pour suggérer une image quasi subliminale : une canopée flottante privée de la plupart de ses soutiens, sorte de clin d’œil poétique venant rappeler que la sylviculture exploite en priorité la forêt pour la production de bois, les « éclaircies » étant des coupes intervenant à plusieurs reprises au cours de la pousse afin d'équilibrer la densité de la parcelle et privilégier les tiges de qualité.

A la fois déséquilibrée et en équilibre, comme en lévitation, la canopée artificielle d'Éclaircies relève du merveilleux, évoquant le Chat de Cheshire d'Alice au Pays des Merveilles, capable d'apparaître et disparaître à volonté, ne laissant parfois flotter que son sourire. Et Alice de s'étonner : « J'ai souvent vu un chat sans sourire, mais jamais un sourire sans chat ! » Souvent un tronc sans branches mais jamais des branches sans tronc.

Il y a aussi dans cet équilibre insolite quelque chose  de la Pataphysique – science des solutions imaginaires, science des solutions particulières, science des exceptions, selon Boris Vian – et du « Catalogue d'objets introuvables » du pataphysicien Jacques Carelman, de son couteau sans lame auquel manque le manche, « indispensable aux acrobates, aux ajusteurs, aux amateurs d'art ». Éclaircies chuchote enfin une allégorie légère et douce de l'adolescence, âge de la quête de l'ancrage, de la recherche de l'équilibre entre le corps et l'esprit.

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"Éclairages"